Et moi je peins ma vie
Serge Reggiani
Mesures à 2 temps 1 temps | 1 temps Avec mes larmes, avec mon sang Et l'encre rouge et bleue de ma mémoire, Avec des films en noir et blanc, Avec des femmes en blanc et noir, Avec le grand pinceau du temps Et la palette de mon désespoir, Avec la toile que me tend Le grand absent des reposoirs, Je peins ma vie comme je peux. Je peins ma vie comme elle vient Excusez-moi du peu ! Je peins ! Rose pastel du sentiment, Cris de couleur lancés au vent du soir Ou gris qui, quotidiennement, Versent des cendres sur l'histoire. Je peins ma vie comme je veux Sans m'occuper des copains Excusez-moi, bon Dieu ! Je peins ! Tu écris et, moi, je peins ma vie Je mets du ciel au milieu des ratures Tu écris et, moi, je peins ma vie, Polichinelle à la triste figure. Je peinturlure. La vie n'a pas eu le talent De me donner l'œil d'aigle de Renoir. Alors, je vais, de mon pas lent, Les chemins creux du purgatoire. Moi, tâcheron de l'air du temps, Je fais des tâches sur mon grand miroir. Et j'arlequine mes tourments Pour les salons de l'illusoire. Je peins ma vie à petit feu. Je peins ma vie tant qu'elle tient. Encore un siècle ou deux. Je peins ! Tu écris et, moi, je peins ma vie Je mets du ciel au milieu des ratures Tu écris et, moi, je peins ma vie, Polichinelle à la triste figure. Je peinturlure. Tu écris et, moi, je peins ma vie Je mets du ciel au milieu des ratures Tu écris et, moi, je peins ma vie, Polichinelle à la triste figure. Je peinturlure. (Parlé:) "Oui, avant c'était, avant, c'était de la barbouille. Et, puis, c'est devenu une espèce de peinturlure. Et puis, et puis, maintenant, petit à petit, ça devient peut-être de la peinture. Peut-être de la mauvaise peinture, mais de la peinture Ah, ah, ah, ah, on verra bien !"