Voir
Pierre Perret
Voir il faut voir sais-tu voir Ce qui compte c'est de voir Les saisons les pauvres gens Les vêt'ments portés trop longtemps Voir il faut voir sais-tu voir Les bonjours de l'habitude Les baisers de lassitude Les sourires de jour de paye La pilule du sommeil, La gitane du réveil Les mains qui vont t'applaudir La bouch'qui va te trahir Voir il faut voir sais-tu voir Quel est l'plus grand désespoir De ceux qui ramp'nt à Pretoria Ou d'ceux qui chant'nt a Bahia Voir il faut voir sais-tu voir Le clochard quand il grelotte Le financier qui sanglote Le soldat mourant de peur Et le mépris d'une foule Pour le champion qui s'écroule Et le regard d'épagneul Du vieillard qui reste seul Voir il faut voir sais-tu voir La fleur séchée dans l'armoire Les adieux les quais les gares Quand les amours se disloquent Voir il faut voir sais-tu voir Le chômeur ancien taulard Qui sera partout tricard Et le destin dérisoire Du vieux travelo sans espoir De la fille sur son trottoir Et du type qu'on a fait boire Et qui fait rire tout l'monde Voir il faut voir sais-tu voir Les dents blanche des présidents Leur sourire à cran d'arrêt Quand ils se partagent le monde Voir il faut voir sais-tu voir Un général qui rigole Une bombe sur l'école Les enfants de Bénarès Qui ont les yeux en ouvre-boîtes Pleins de mouches et de questions A l'univers qui regrette Mais qui n'a pas d'solution Voir il faut voir sais-tu voir Dans ces jardins de brouillard La statue de Bolivar Sur la pelouse interdite Voir il faut voir sais-tu voir Si on confond quelque part Les landaus avec les chars Le bon Dieu et le dollar Bien que ceux qui font l'histoire Aient toujours cousu leur bouch' Il faut voir dans quel mouchoir La vérité se mouche Voir il faut voir sais-tu voir Ce qui compte c'est de voir