La petite Juive

Maurice Fanon

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Dans ce monde borné de quel entre deux guerres Où ceux qui font les lois les troussaient par derrière, Nous n'avions que cinq ans, du pain sec au dessert, Pour cinq lettres de trop ou un pet de travers ; On nous disait : »tu vois, c'est la croix que Grand-père A gagné au chemin des dames, et nos grands frères, Abandonnant le bleu pour un kaki douteux Cocufiaient Madelon dans les bras de Marlène, Une fois l'an, nous allions voir entre père et mère La victoire en chantant nous ouvrir la barrière, Et nous nous en allions en suçant des bonbons Jouer du revolver à trois sous le bouchon !      Et je me souviens la petite juive,       Elle me disait « viens ! », elle était jolie, On faisait des bêtises, ou l'on ne faisait rien, Elle s'appelait Lise et je m'en souviens ! Dans ce monde truqué de quelle drôle de guerre Où ceux qui font le front le bradaient à l'arrière, Nous n'avions que quinze ans et dans nos gibecières Une histoire de France qui tombait en poussière, On nous a fait marcher, traverser des rivières Sur des ponts d'Avignon qui dansaient à l'envers, Ca tirait par devant, ça poussait par derrière, Les plus pressés n'étaient pas les moins militaires, On nous a fait chanter pour un ordre nouveau D'étranges Marseillaises de petite vertu Qui usaient de la France comme d'un rince-cul Et s'envoyaient en l'air à l'ombre des ghettos ! Et je me souviens, la petite juive, On lui a dit : »viens ! », elle était jolie, Elle a fait sa valise, un baiser de la main, Elle s'appelait Lise, il n'en reste rien ! Dans ce monde mort-né d'avant quelle autre guerre Où le Japon blessé lèche encore son cancer, Dans ce monde sceptique où ceux qui ont la foi Ne savent plus si Dieu est devant ou derrière, Dans ce monde d'argent où la banque surnage Comme un poisson ventru qui attend le naufrage, Nous n'avons que trente ans, sainte trouille de la guerre, Et pourtant, nous n'avons pas cessé de la faire, On nous a fait marner traverser des rivières De Charybde en Scylla, de djebels en rizières, Comme si nous n'avion pas autre chose à faire Qu'a montrer notre cul aux quatre coins de la terre ! Et je me souviens la petite juive, Elle me disait « viens ! », elle était jolie, On faisait des bêtises, ou l'on ne faisait rien, Elle s'appelait Lise et je m'en souviens ! J'ajoute personnellement « Et comme disait un député européen, ça n'était qu'un détail de l'histoire ! »

Du même artiste :

empty heart empty heart B7, Em, D7, G, Em7/D, A/C#, Am/C
La chanson évoque les souvenirs d'un narrateur qui traverse les épreuves d'une jeunesse marquée par la guerre et l'injustice. Il se souvient d’une petite fille juive, Lise, avec qui il partageait des moments insouciants, mais dont la vie a été tragiquement interrompue par la violence de ce monde troublé. À travers ces réminiscences, il dépeint un tableau d'une jeunesse sacrifiée, d'une France en désintegration et d'un sentiment de désespoir face à la cruauté humaine. Le contexte de cette chanson se situe entre les deux guerres mondiales, une période où les tensions sont palpables et où l'innocence d'enfants comme le narrateur et Lise est brutalement confrontée à la réalité du monde adulte et des atrocités qui s'ensuivent. Les souvenirs sont teintés de nostalgie, mais aussi de critique envers ceux qui manipulent et exploitent cette tragédie humaine.