Il suffit de passer le pont
Georges Brassens
Il suffit de passer le pont, C'est tout de suite l'aventure ! Laisse-moi tenir ton jupon, J't'emmèn'visiter la nature ! L'herbe est douce à Pâques fleuries, Jetons mes sabots, tes galoches, Et légers comme des cabris, Courons après les sons des cloches ! Ding ding dong, les matines sonnent, En l'honneur de notre bonheur, Ding ding dong, faut l'dire à personne, J'ai graissé la patte au sonneur... Laisse-moi tenir ton jupon Courons guilleret, guillerette, Il suffit de passer le pont, Et c'est le royaum'des fleurettes... Entre tout's les bell's que voici, Je devin'cell'que tu préfères : C'est pas l'coquelicot, Dieu merci ! Ni l'coucou, mais la primevère, J'en vois un'blottie sous les feuilles, Elle est en velours comm'tes joues. Fais le guet pendant qu'je la cueille, « Je n'ai jamais aimé que vous ! » Il suffit de trois petits bonds, C'est tout de suit'la tarentelle, Laisse-moi tenir ton jupon J'saurai ménager tes dentelles, J'ai graissé la patte au berger Pour lui faire jouer une aubade. Lors ma mie, sans croire au danger, Faisons mille et une gambades, Ton pied frappe et frappe la mousse. Si l'chardon s'y pique dedans, Ne pleure pas, ma mie qui souffres Je te l'enlève avec les dents ! On n'a plus rien à se cacher On peut s'aimer comm'bon nous semble Et tant mieux si c'est un péché Nous irons en enfer ensemble ! Il suffit de passer le pont, Laisse-moi tenir ton jupon Il suffit de passer le pont, Laisse-moi tenir ton jupon