Il n'y a d'honnête que le bonheur
Georges Brassens
Dans l'ombre des forêts Y'a des endroits gentils En voyage d'intérêt Les maris sont partis. Les maris sont des gens au front morne C'est l'moment ou jamais d'les égayer de cornes. Viens ! Pose ton fardeau De bonnes manières Sur le gros dos D'la cuisinière Et jette la clef de ton bonheur Dans la mare aux canards. Viens ! Quand le printemps Fou d'allégresse Rôde, chantant Sur nos tendresses. Il n'y a d'honnête que le bonheur. Vois le vent, le vent d'opérette Ah ! Quel être intelligent Qui des toits s'apprête A foutre des pots de fleurs sur la gueule des agents. Mais oui, viens ! Sautons au cou De l'hirondelle Et laissons-nous A tire d'aile Conduire loin de la pudeur. Viens ! Si nous voyons Sur une sale tête Un chapeau m'lon Qui nous embête Nous le flanqu'rons par terre pour Jouer au ballon avec. Viens ! Si les grosses roues D'un véhicule Coupent le cou D'une renoncule Nous les crèverons avec amour. Si cette brute de garde-champêtre S'avise de nous engueuler Nous l'enverrons paître Ou bien nous le pendrons à un arbre isolé. Mais oui, viens ! Si des fruits mûrs Doucement dépassent Le haut d'un mur Sous l'quel on passe Nous leur prêt'rons notre concours. Viens ! J'ai pas trop d'trous A mes chaussettes J'ai pas d'verrou A ma cassette. J'n'ai d'ailleurs pas d'cassette non plus Comme ton idiot d'mari... Viens ! J'te prendrai pas Pour ma p'tite bonne J't'imposerai pas D'Solo d'trombone Le soir, une fois le café bu. De retour de maquignonnage Le sale cornard comprendra Le désavantage De faire estampiller son amour par l'État. Mais oui, viens ! Pour nous s'éveillent Ô bonne fortune En plein soleil Des clairs de lune En pleine nuit, des soleils nus.