Grand-Père
Georges Brassens
Grand-Père suivait en chantant, La route qui mène à cent ans La mort lui fit au coin du bois, L'coup du père François. L'avait donné de son vivant, Tant de bonheur à ses enfants Qu'on fit pour lui en savoir gré, Tout pour l'enterrer. Et l'on courut à toutes jambes, Quérir une bière mais Comme on était léger d'argent, Le marchand nous reçut à bras fermés. « Chez l'épicier, pas d'argent pas d'épices, Chez la belle Suzon, pas d'argent pas de cuisses Les morts de basse condition, C'est pas de ma juridiction ! » Or, j'avais hérité d'Grand-Père, Une paire de bottes pointues S'il y a des coups d'pied que'qu'part qui s'perdent, C'lui-là toucha son but ! C'est depuis ce temps-là que le bon apôtre C'est depuis ce temps-là que le bon apôtre Ah ! c'est pas joli, Ah ! c'est pas poli, A une fesse qui dit merde à l'autre Bon papa, Ne t'en fais pas, Nous en viendrons, A bout de tous ces empêcheurs d'enterrer en rond. Le mieux à faire et le plus court, Pour qu'l'enterrement suivit son cours Fut de borner nos prétentions, À une bière d'occasion. Contre un pot de miel on acquit, Les quatre planches d'un mort qui Rêvait d'offrir quelques douceurs, À une âme soeur. Et l'on courut à toutes jambes, Quérir un corbillard mais Comme on était léger d'argent, Le marchand nous reçut à bras fermés. « Chez l'épicier, pas d'argent pas d'épices, Chez la belle Suzon, pas d'argent pas de cuisses Les morts de basse condition, C'est pas de ma juridiction ! » Ma botte partit mais je m'refuse, De dire vers quel endroit Ça rendrait les dames confuses, Et je n'en ai pas le droit C'est depuis ce temps-là que le bon apôtre C'est depuis ce temps-là que le bon apôtre Ah ! c'est pas joli, Ah ! c'est pas poli, A une fesse qui dit merde à l'autre Bon papa, Ne t'en fais pas, Nous en viendrons, A bout de tous ces empêcheurs d'enterrer en rond. Le mieux à faire et le plus court, Pour qu'l'enterrement suivit son cours Fut de porter sur notre dos, L'funèbre fardeau S'il eût pu revivre un instant, Grand-Père aurait été content D'aller à sa dernière demeure, Comme un empereur Et l'on courut à toutes jambes, Quérir un goupillon mais Comme on était léger d'argent, Le marchand nous reçut à bras fermés. « Chez l'épicier, pas d'argent pas d'épices, Chez la belle Suzon, pas d'argent pas de cuisses Les morts de basse condition, C'est pas de ma juridiction ! » Avant même que le vicaire, Ait pu lâcher un cri J'lui bottai l'cul au nom du Père, Du Fils, et du Saint-Esprit C'est depuis ce temps-là que le bon apôtre C'est depuis ce temps-là que le bon apôtre Ah ! c'est pas joli, Ah ! c'est pas poli, A une fesse qui dit merde à l'autre Bon papa, Ne t'en fais pas, Nous en viendrons, A bout de tous ces empêcheurs d'enterrer en rond. A bout de tous ces empêcheurs d'enterrer en rond. (Bis)