Se taire avec un ami
François Morel
(x2) Il y a les grandes tables rondes Où l'on parle fort, où l'on fume Où l'on défait, refait le monde Où l'on taille quelques costumes Il y a les soirées enivrées Où on ne sait plus bien à la fin Ce qu'au début on défendait. Resterait-il un peu de vin ? Il y a les longues discussions Quand on finit un peu pompette Par se traiter de tous les noms : "Vendu, pourri, analphabète" Il y a tous les serments d'amour, Les déclarations passionnées : "Je t'aime, t'aimerai toujours" La rime est pauvre, je l'admets Mais se taire, se taire avec un ami Se taire, ne rien dire, ne pas causer Dehors, dehors, il pleut, mais à l'abri Du silence, se réfugier Il y a les soirées militantes Où l'on doit voter des motions Il y a les soirées où l'on chante Moustaki, Brassens et Souchon Les bavardages inépuisables, Les disputes, les controverses, Les querelles interminables, Séances au café du commerce Mais se taire, se taire avec un ami Se taire, ne rien dire, ne pas causer Dehors, dehors, il pleut, mais à l'abri Du silence, se réfugier Il y a les causeries, les ragots, Les médisances, les babillages, Les « y paraît », les « à propos", Les racontars, les papotages. Il y a parfois, tard dans la nuit, La cérémonie des aveux. On fait quelques cachotteries, Confidences les yeux dans les yeux Mais se taire, se taire avec un ami Oh ! Se taire, être silencieux à deux Dehors, dehors, on n'entend plus la pluie C'est bon de s'ennuyer un peu Et, quand le soleil apparaît, Tout d'un coup, tiens, l'un s'émerveille: "Ce n'était qu'une pluie d'été Regarde un peu, un arc-en-ciel !" Du tac au tac, une heure après, L'autre répond d'un ton formel : « Ah oui, c'est vrai, je reconnais, Il était beau, cet arc-en-ciel » Ah ! Se taire, se taire avec un ami Oh ! Se taire, éviter les commentaires Ça peut durer, durer toute une vie L'été prend ses quartiers d'hiver Ah ! Se taire, se taire avec un ami Oh ! Se taire, éviter les commentaires Ça peut durer, durer toute une vie L'été prend ses quartiers d'hiver.