Les relations mondaines
Charles Trenet
J'ai des relations mondaines, J'ai des relations. J'connais la baronne du Maine, Son fils Absalon. J'vais les voir chez eux un'fois par s'maine Dans leur vieux salon Où tout un gratin s'démène, s'promène En large et en long. J'y côtoie des gens illustres, Membres de l'Institut, Rassemblés autour d'un lustre Ils me disent "Tu" ! Par un jeu savant d'miroirs et d'glaces, Dans leurs beaux atours, On les voit d'profil, de dos et d'face, Croquant des p'tits fours. Vous connaissez tous Pilâtre, L'acteur du Français. Il m'a dit hier soir : "L'théâtre, moi j'en ai assez. Une affaire de poupées en plastique M'appelle à Pamiers. A savoir cette nouvelle fantastique, Vous êtes le premier !" Grâce aux relations mondaines, Grâce aux relations, J'donne des lettres par centaines De recommandation ; Ainsi, ma filleule du Finistère, La petite Fanny, Travaille à présent au Ministère Des Travaux Finis. J'ai fait mon cousin Rodolphe Placier d'cinéma Et mon oncle, Paul-Adolphe, Huissier au Sénat. Quant à moi, j'vis bien et m'en contente. Tel est mon destin, Dans ma chambrette, sous la soupente 11 rue Caumartin... Là, les relations mondaines Ne m'empêchent pas De r'trouver huit fois par s'maine La petite Ida Qui n'demande rien à l'existence Rien qu'un peu d'bonheur. Ça suffit pour qu'nos deux coeurs, je pense, Ne forment qu'un coeur. Loin des relations mondaines, Loin des relations, Nous allons au bord d'la Seine À la belle saison. Quand arrive l'hiver et sa froidure, Au lit nous restons Et c'est bien c'qu'il y a d'meilleur, j'vous l'jure, Dans mes relations...