Le piano de la plage
Charles Trenet
Le vieux piano d'la plage ne joue qu'en fa, qu'en fatigué Le vieux piano d'la plage possède un la qui n'est pas gai Un si cassé qui se désole Un mi fané qui le console Un do brûlé par l'grand soleil du mois d'juillet Mais quand il joue pour moi Les airs anciens que je préfère Un frisson d'autrefois M'emporte alors dans l'atmosphère D'un grand bonheur dans une p'tite chambre Mon joli coeur du mois d'septembre Je pense encore, encore à toi Do mi sol la Le vieux piano d'la plage ne joue qu'en sol, en solitude Le vieux piano d'la plage a des clients dont l'habitude Est de danser samedi, dimanche Les autres jours seuls sur les planches Devant la mer qui se souvient, il rêve sans fin... C'est alors que je sors Tout courbatu de ma cachette Et que soudain dehors Tremblant, ému, d'vant lui j'm'arrête Et c'est inoui tout c'que j'retrouve Comme cette musique jolie m'éprouve Me fait du mal, me fait du bien J'n'en sais trop rien. Adieu, adieu, piano, tu sais combien peuvent être cruelles Ces notes que tu joues faux, mais dans mon coeur ouvrant ses ailes S'éveille alors la douce rengaine D'mon heureux sort ou de mes peines Lorsque tu tapes, tapes toute la s'maine Mais le samedi Quand les jeunesses débarquent Tu sais alors, brigand d'la plage Que ton souvenir les marque Et qu'un beau soir, passé l'bel âge Un autre que moi, devant la piste S'arrêtera là et sera triste En écoutant, le coeur battant L'air de ses vingt ans.