Ils sont partis
François Budet
Ils sont venus de la mer Ils sont arrivés un soir Sur une espèce de galère Qui battait pavillon noir Et, sur ce sacré bateau, Il y avait une sirène Qui vous collait froid dans l'dos Tant sa voix était humaine. Ils sont partis Comme ils étaient venus. Personne ici Ne les a reconnus. Et le nom de ce navire, On n'a jamais su le lire, Il était écrit pourtant A l'arrière et à l'avant Pourtant, ce nom, je crois bien, Voulait nous dire quelque chose. Mais voila, pour le comprendre, Il suffisait de l'aimer. Ils sont partis Comme ils étaient venus. Personne ici Ne les a reconnus. Ils parlaient dans un langage Que personne ne comprenait, Même les vieux du village Qui avaient tant voyagé. J'ai vu au fond de leurs yeux Et j'ai compris leurs visages Car, entre gens malheureux, Nous avons notre langage. Ils sont partis Comme ils étaient venus. Personne ici Ne les a reconnus. Mais quand le jour s'est levé, Ils étaient déjà très loin. Il n'y avait plus de galère Et plus de pavillon noir. Mais, depuis cette nuit-là, La sirène de malheur A laissé au fond de moi La folie des grands départs. Ils sont partis Comme ils étaient venus Personne ici Ne les a reconnus. Ils sont partis Comme ils étaient venus. Personne ici Ne les a reconnus.